Portrait de la rémunération des médecins de 2000 à 2009

Le système de rémunération des médecins est au cœur de longues négociations entre le Ministère de la Santé et des Services Sociaux (MSSS) et les fédérations de médecins. Ces négociations mènent à des ententes ou accords-cadres qui ont pour objet, entre autres, de modifier le mode et le montant de la rémunération des médecins. Depuis 2000, deux changements majeurs sont survenus à cet égard : création des groupes de médecine familiale (GMF) en 2002 et introduction de la rémunération mixte en 1999. Par ailleurs, la littérature empirique et scientifique montre que les modes et structures de rémunération des médecins affectent leurs comportements au regard du nombre et du type d'actes médicaux posés et de la qualité de ces actes. Les auteurs de cette étude se demandent si les modifications dans les modes de rémunération des médecins survenues au Québec depuis une dizaine d'années s'alignent avec la littérature scientifique sur ce sujet.

Pour répondre à cette question, cette étude aborde en premier lieu le système actuel de rémunération des médecins québécois et explique les différents modes possibles, ainsi que leurs avantages et désavantages. En deuxième lieu, l'étude présente une analyse descriptive de l'évolution des montants rémunérés entre 2000 et 2009, par type de rémunération et lieu de pratique pour l'ensemble des médecins, pour les omnipraticiens et pour les spécialistes. Ceci permet de mettre en évidence la répartition des différents modes de rémunération et son évolution entre 2000 et 2009.

Le constat est que ces deux réformes ont effectivement mené à des modifications dans la répartition des dépenses en rémunération des médecins en fonction des modes de rémunération et aussi à des modifications dans la répartition des lieux de facturation.

Chez les omnipraticiens, on observe une baisse, en pourcentage des dépenses totales, de la rémunération à l'acte (RA) au profit de la capitation (ou forfaits). Mais la RA demeure le mode de rémunération le plus courant et de loin, qui représente 68 % des dépenses en rémunération des omnipraticiens. Les GMF et les cliniques privées sont le lieu privilégié de facturation des actes avec 57 % des dépenses ou 71 % du nombre d'actes facturés. Par contre, l'augmentation des GMF ne semble pas s'être traduite en un accès accru aux médecins de famille, car depuis l'implantation des GMF en 2002, le pourcentage de personnes ayant un médecin de famille régulier au Québec a diminué de 3 % et l'accès en dehors des heures normales de bureau n'est pas meilleur qu'avant.

Les médecins spécialistes ont, depuis environ l'année 2000, de plus en plus recours à la rémunération mixte qui occupe maintenant presque 20 % des dépenses en rémunération des spécialistes. Leur principal lieu de facturation en 2009, tous modes de rémunération confondus, est les CHSCD, suivi des cliniques externes et des cliniques privées et des GMF. On constate aussi qu'en comparaison du nombre d'actes facturés par les omnipraticiens, qui a augmenté de 18 %, le nombre d'actes facturés par les spécialistes n'a augmenté que de 8 % entre 2000 et 2009. Il semble donc que la rémunération mixte a bien eu pour effet de limiter la croissance des actes facturés.

Cette analyse, qui se veut plutôt un portrait, met en évidence que le système de rémunération est complexe et varié et qu'il a des répercussions sur le comportement des médecins. Cela se reflète en partie dans les modifications de la répartition des différents modes de rémunération et des lieux de facturation. Cette analyse fait aussi surgir bien des questions sur l'impact de ces réformes qui ont été mises en place afin d'améliorer le système de santé : que ce soit en termes d'accès, de qualité ou pour limiter les dépenses. Il devient alors impératif, pour la société québécoise, d'évaluer ces réformes et de déterminer si elles ont produit les effets qu'elles étaient censées créer.

[ - ]
[ + ]