Quels sont les impacts de la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d'œuvre sur les niveaux de formation au Québec?

Le 1er janvier 2004, une réforme de la loi 90 suspendait, pour les entreprises de taille moyenne, l'obligation d'investir 1 % de leur masse salariale en formation. Dans cette étude, nous traitons cette réforme comme une expérience naturelle pour estimer l'impact de la loi 90 sur les décisions des établissements en matière de formation. En particulier, nous voulons déterminer si la loi 90 a réussi à faire augmenter les niveaux de formation au Québec. Nous utilisons pour ce faire les données de l'Enquête sur le milieu de travail et les employés (EMTE) de Statistique Canada. Ces données proviennent d'une source neutre et contiennent de l'information détaillée sur les pratiques de formation des établissements québécois et sur leur masse salariale avant et après la réforme. Au Québec, la comparaison des niveaux agrégés de formation avant et après la réforme montre une baisse de 13,2 % de l'intensité moyenne de la formation en classe comparée à une hausse de 10,4% pour la formation en cours d'emploi. Ces mouvements opposés sont compatibles avec l'hypothèse que les entreprises n'ont que peu ou pas augmenté leurs efforts de formation suite à la mise en œuvre de la loi 90, mais plutôt substitué de la formation informelle (ou en cours d'emploi) pour de la formation plus structurée (ou en classe). L'estimation des modèles statistiques montre qu'il est toutefois difficile de juger définitivement à savoir si ces mouvements annuels avant et après la réforme sont vraiment causés par cette dernière ou s'ils sont le fruit du hasard. Nos estimés les plus précis utilisent les variations dans les décisions en matière de formation sur une période de 4 ans autour de la réforme et comparent la probabilité qu'un travailleur québécois participe à de la formation comparé à son homologue ontarien. À l'aide de ce dernier modèle, nous concluons que la réforme a diminué de façon significative la probabilité qu'un travailleur québécois d'un établissement de taille moyenne reçoive de la formation en classe par rapport à son homologue ontarien. Cette baisse est plus que compensée par une hausse de la probabilité de recevoir de la formation en cours d'emploi. Il ressort donc que, lorsque l'on prend en compte la hausse de l'incidence de la formation informelle qui a suivi la réforme, l'élimination de l'obligation d'investir 1 % de la masse salariale en formation pourrait même avoir provoqué une hausse de la probabilité de recevoir de la formation chez les travailleurs des entreprises concernées.
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